mercredi 23 décembre 2020

Mon classement des jeux Pokémon

 

Bonjour à tous ! Continuons de fêter la sortie de Philosophe, Pikachu ! en parlant un peu de Pokémon. La dernière fois, j’avais fait le classement de mes Pokémon légendaires préférés. Je continue sur ma lancée en faisant aujourd’hui la liste de mes jeux préférés.

 


Les liens, pour ceux que ça intéresse :

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-          Vers l’article sur les Pokémon légendaires : Mon classement des Pokémon légendaires

 

Il y a pas mal de jeux Pokémon, mais je vais faire la liste uniquement de ceux auxquels j’ai déjà joué au moins une fois. Tous les jeux de la licence principale y sont. Je mets évidemment ensemble les versions identiques :

 

Rouge/Bleu ; Jaune ; Pokémon Stadium ; Pokémon Pinball ; or/argent ; Cristal ; Rubis/Saphir ; Emeraude ; Rouge feu/Vert feuille ; Emeraude ; Donjon mystère Bleu ; Diamant/Perle ; Platine ; Heartgold/Soulsilver ; Noir/Blanc ; Noir2/Blanc2 ; X/Y ; Rubis oméga/Saphir Alpha ; Soleil/Lune ; Pokémon Go ; Let’s go Evoli ; Epée/Bouclier ; Pokémon Masters ; Donjon mystère DX

 

 

Premier groupe : ceux auxquels je n’ai pas assez joué

Pokémon Stadium ; Cristal ; Diamant/Perle ; Noir2/Blanc2

 

Commençons le classement, avec un premier groupe assez facile. J’ai joué au moins une fois à tous les jeux qui sont dans la liste, mais je n’ai pas eu l’occasion d’avoir chez moi tous les jeux, et certains ont juste été testés, chez des amis ou en Roms (pour ceux qui ne savent pas ce que c’est, c’est sur simulateur sur l’ordinateur) Je regrette notamment le fait que je n’aie pas Noir 2 et Blanc 2 parce que j’ai bien aimé le début et que j’ai entendu beaucoup de bien du post game, mais je ne désespère pas de les retrouver un jour d’occasion. Je n’ai fait que Pokémon Platine, donc je classe ici Diamant/Perle, juste pour montrer que je ne les ai pas oubliés.

 


Deuxième groupe : le coup de vieux est trop violent

Rouge/Bleu ; Or/argent ; Rubis/Saphir ; Donjon Mystère Bleu

 

Ce sont des jeux qui ont eu des remakes, et comme ils sont vraiment bienvenus, je mets ceux-là ici. J’y place le tout premier jeu que j’ai eu (Pokémon or) et donc une source de nostalgie énorme. Mais ils ont eu un remake que je vais pouvoir placer très haut dans le classement donc je les laisse là, parce qu’ils ont quand même eu un sacré coup de vieux.

 

Troisième groupe : de très bons souvenirs d’enfance

Jaune ; Pinball ; Emeraude

 

Alors oui, je place le fameux Pokémon Pinball dans cette catégorie, parce qu’en fait c’est celui-là le tout premier jeu Pokémon que j’ai eu (la version or a été mon premier jeu d’aventure, de la licence principale), donc j’y ai vraiment beaucoup joué. Pokémon Jaune reste aussi un bon souvenir. Celui qui est vraiment selon moi le meilleur des « vieux » jeu est Pokémon Emeraude : mon premier Pokémon coup de cœur (Braségali) et le post-game exceptionnel, avec la zone de combat. Toute une zone de bâtiments avec des défis à faire. J’y ai passé des heures, et je rêve d’un jeu où on retrouverait une telle zone de combat.

 


Quatrième groupe : Sympa mais pas mes préférés

Rouge feu/Vert feuille ; Platine ; Soleil/Lune ; Pokémon Masters ; Donjon mystère DX ; Let’s go Evoli ; X/Y 

 

Pas mal de jeux là-dedans, un peu de tout. Je m’arrête déjà sur Pokémon Masters, le petit jeu sur portable, que j’aime vraiment bien. Le problème, c’est que les mise à jour sont très volumineuse et que je n’ai pas souvent la patience de les télécharger, ce qui me conduit à oublier le jeu plusieurs fois avant de m’y remettre. Pour les versions Platine et Rouge Feu / Vert feuille, je les ai faits et j’aime bien aimé mais ce ne sont vraiment pas mes préférés. J’ai même eu un peu de mal à terminer Platine. Je ne sais pas trop pourquoi étant donné que j’aime énormément la mythologie de cette génération. J’ai bien aimé également le remake de Donjon mystère (j’aime beaucoup l’histoire racontée dans l’aventure à vrai dire) et les dernières versions.

                                         

Cinquième groupe : Faits et refaits, voire Pokédex complété !

Noir/Blanc ; Rubis oméga/Saphir Alpha ; Ultra-soleil/Ultra-lune ; Pokémon Go

 

J’arrive vraiment dans les jeux que j’adore… et que j’ai refaits de nombreuses fois. Exception faite pour Pokémon Go qui ne se « termine » pas. Malheureusement ce jeu souffre tous les ans du passage à l’hiver, quand je n’ai plus du tout envie de sortir, mais quand je rouvre l’application, ça me fait toujours plaisir. Pokémon Noir est vraiment une version que j’adore, seul bémol : je n’aime pas les starters et je ne sais jamais avec qui commencer. Je retrouve mon Braségali dans Rubis Oméga/Saphir Alpha alors c’est toujours un plaisir et j’ai beaucoup refait Ultra-Lune et Ultra-Soleil, même si les arènes manquent. C’est sur ces jeux que j’ai shassé (cherché des shiny) pour la première fois et je garde un excellent souvenir de l’arbre de combat en fin de jeu.

 


Mon jeu préféré…

AAAh désolée mais je n’ai vraiment pas réussi à choisir. Je suis partagée avec la nostalgie évidente que m’inspire Heartgold et Soulsilver puisque ce sont les remake de mon tout premier jeu. En plus les Pokémon se promènent derrière nous alors c’est trop mignon. Quant aux tous derniers jeux… Si vous me connaissez, vous savez ma passion pour le foot, pour le foot anglais en particulier, et les références à la culture anglaise s’accumulent dans Epée et Bouclier : les arènes pokémon comme d’énormes stades de foot dans les villes, la ligue Pokémon remplacée par la Ligue Tournoi des champions, Pyrobut le starter footballeur, puis d’autres Pokémon que j’ai adoré comme la tasse de thé Polthégeist (j’adore le jeu de mots du nom au passage !), le punk Salarsen, le James bond Lézargus, etc. Je pense, du coup, que Pokémon Epée et Bouclier sont les versions qui correspondent le plus à mes goûts. Mais la nostalgie est là, et je n’ai pas pu mettre HeartGold et Soulsilver plus tôt dans le classement.

jeudi 17 décembre 2020

La pop-philo est-elle sérieuse ?

 

Bonjour à tous !

 

On se retrouve aujourd’hui exceptionnellement pour que je mette enfin au clair quelques points qui semblent poser problème à mon entourage (j’inclus dans l’entourage la communauté littéraire qui me suit sur les réseaux sociaux). Depuis peu je suis entrée dans la mode de la pop-philo (parce que je le dis, c’est une mode, et je n’ai pas honte d’être victime de cette mode). La pop-philo, pour rappel, c’est quand quelqu’un qui s’y connaît en philosophie (souvent un prof de lycée, et même souvent un prof d’un lycée de banlieue, pas du lycée élitiste de centre-ville, détail qui a son importance selon moi) prend une œuvre populaire, la plus populaire et surtout la plus commerciale possible puisqu’il faut quand même vendre, et s’en sert pour expliquer des notions de philosophie très compliquées. Bref, mode ou opération commerciale, je veux bien croire qu’elle est aux antipodes de ce que doit être la philosophie.

 

Mais en réalité, je ne rejette pas systématiquement ce qui est commercial. En fait, dans mon entourage, je sais pertinemment que certaines personnes n’auraient jamais pris la peine d’écouter la moindre phrase relevant de la philosophie s’il n’y avait pas eu « Disney » ou « Pokémon » écrit à côté. Comme ce qui arrive aux personnes que je connais n’est à mon avis pas unique, je pense donc que si la curiosité naturelle qui pousse à se plonger dans la Critique de la raison pure est rare, celle qui fera lire un livre expliquant la philosophie à partir de Disney ou Harry Potter sera beaucoup plus fréquente. Et peut-être (on l’espère tous à mon avis !) que cette première étape conduira à vouloir ensuite lire quelque chose de plus difficile et surtout de plus sérieux.

 


Notez que j’ai bien dit « expliquer la philosophie à partir de Disney et Harry Potter » et non pas « expliquer la philosophie de Disney et Harry Potter ». En effet, je pense que le gros contresens de ceux qui croient qu’on « cherche des trucs là où y’en a pas » (variante du : « tu crois vraiment que l’auteur il a réfléchi à tout ça avant d’écrire ? ») c’est justement ça : à aucun moment nous (je m’inclus dans les auteurs de pop-philo puisque j’en fais partie) ne prétendons qu’il y a la moindre trace de réflexion philosophique dans l’œuvre populaire étudiée. Bon, peut-être pas la moindre trace : je pense que ça peut arriver qu’un passage de film ou de roman essaie vraiment de poser un problème. Il n’empêche que ce n’est pas la majeure partie, et que ce n’est pas ce qui nous intéresse ici. Le travail de l’auteur de pop-philo est le même que celui du prof de lycée ordinaire, qui n’a pas devant lui « l’élite » à qui la philosophie était réservée il y a presque un siècle : expliquer de façon compréhensible et qui peut susciter l’intérêt les problèmes et thèses principales des auteurs.

 

Pour moi, il n’y a aucune différence entre, par exemple, le travail de Marianne Chaillan dans Harry Potter à l’école de la philosophie et le procédé utilisé par mon ancien prof en terminale (qui, au passage, s’est offusqué de cette « piposophie contemporaine » qui essayait de faire croire qu’il y avait de la philo dans Game of Thrones, prouvant par là qu’il n’avait jamais ouvert un de ces livres… et dire que c’est lui qui m’a appris que la meilleure façon de dire des conneries c’est de parler de ce qu’on a pas lu) qui, pour nous expliquer par exemple la morale kantienne, nous disait : « Imaginez par exemple que mémé Marcelle va mourir bientôt : est-ce qu’il est immoral de le lui cacher ? » Je soutiens vraiment que c’est la même chose d’inventer ainsi une situation ou de chercher un extrait de film ou de livre populaire où il y a effectivement un personnage qui se demande si ce sera moral ou non de mentir dans telle ou telle situation. L’œuvre populaire ne sert que d’exemple pour illustrer une thèse, voire de moyen mnémotechnique pour des élèves qui ont du mal à retenir les idées. De fait, si vous associez l’anneau de Gygès de Platon à la cape d’invisibilité de Harry Potter, ça peut sans doute aider à retenir.

 


Je précise néanmoins que je serais parfaitement d’accord avec mon collègue cité ci-dessus, si la pop-philo était effectivement ce qu’il décrit dans son article : ce serait n’importe quoi, une façon de chercher des trucs où il n’y en a pas, et la décadence de la philosophie si vous voulez. Mais, du moins dans mon expérience, ce n’est pas le cas, et j’ai lu beaucoup de livres de pop-philo parce que j’adore ça. Je vais quand même lui accorder que dans le tas, il y en a forcément qui prennent au sérieux la pop-culture. Je suis d’ailleurs extrêmement déçue par les essais plus récents de Marianne Chaillan, dont j’avais adoré le livre sur Harry Potter. Notamment dans La playlist des philosophes, sans doute par rejet de ceux qui se moquaient de son projet (et il y en avait, elle le dit en introduction), elle a tendance à finir ses chapitres par quelque chose du genre : « donc oui oui vous faites de la philo quand vous écoutez Lara Fabian ! » Alors… euh… Non, en fait. Quand vous écoutez Lara Fabian (que j’aime beaucoup par ailleurs), vous écoutez Lara Fabian. Ce qui n’empêche pas d’illustrer comme elle le fait une thèse sur autrui avec ce qui est effectivement dit dans « Tu es mon autre » de Lara Fabian et Mauranne. Je reconnais malgré tout son très beau projet de « sauver » la pop-culture, qui n’est pas faite pour les imbéciles non plus…

 

Ce qui est vrai avec la philosophie l’est évidemment avec les autres domaines. J’ai par exemple un livre sur « La science dans Star Wars. » L’auteur va-t-il montrer qu’il y a de grandes théories physiques proposées et expérimentées dans Star Wars ? Franchement, même si je ne l’ai pas encore lu, je ne pense pas… A mon avis (et je le confirmerai quand ce sera lu puisque, très paradoxalement, je viens de critiquer ceux qui parlent de livres qu'ils n'ont pas lus) il va utiliser certaines images du film pour illustrer (visuellement) des théories physiques, notamment de physique quantique, extrêmement compliquées pour un non-physicien comme moi (même si je connais les bases).

 


Deux choses à bien comprendre donc, pour récapituler et conclure :

1)      La pop-philo, dans sa majorité, ne prétend pas que l’œuvre populaire est d’une philosophie égale à un vrai texte de philosophie. Et si certains prétendent ça, vous pourrez effectivement répondre qu’ils « cherchent des trucs là où il n’y en a pas. »

2)      En revanche, je ne nie absolument pas toute qualité aux œuvres populaires. Je pense qu’il y a une grande sensibilité par exemple dans les Disney, avec parfois des intuitions très profondes sur certaines choses. Je pense aussi qu’il y a eu un énorme travail de recherche et de réflexion dans l’écriture d’Harry Potter et que le nier serait vraiment faire preuve de mauvaise foi. De là à dire qu’il y a de la « philosophie » dedans, non. (Pour un rappel de ce qu’est la philosophie, je vous renvoie à mon article précédent : La mousse est-elle vivante ?)

 

Alors, oui, ceux qui liront auront peut-être l’impression qu’on les conforte dans leur idée de la pop-culture a autant de valeur que la « haute » culture. Mais est-ce que c’est vraiment la faute du livre s’il a été mal compris ? On a bien vu les usages désastreux qui auront été faits de Nietzsche ou Marx… En tout cas, pour ceux qui me suivent et me lisent, je ne pense pas (à moins d’une erreur de formulation) que vous ne trouviez une seule phrase où je loue la qualité philosophique interne à une œuvre de Disney : rien de plus que des comparaison entre ce qu’ont dit les philosophes et ce qui se passe dans l’histoire. Après tout, quand j’entends dix fois au cours d’un films « Mowgli, tu ne dois pas utiliser d’objets techniques dans la jungle, ce n’est pas comme ça que se comporte un animal », je trouve que c’est un bon exemple pour illustrer la thèse de Bergson selon laquelle la technique est bien le propre de l’homme…

mardi 15 décembre 2020

Idées de lecture : la liberté

 Ah, la liberté… Tout le monde en parle, et tout le monde en mélange les sens, et tout le monde est tout fier de la défendre. Ce doit pourtant être une des notions les plus difficiles qui sont abordées en classe de Terminale. Plus le terme est courant, plus chacun l’utilise à sa sauce, et plus il devient difficile pour les débutant d’arrêter de l’utiliser à leur sauce pour interroger ce qu’est véritablement la liberté. Et comme le disait Hegel : « Le bien connu, justement parce qu’il est bien connu, est mal connu. »

 

Bienvenue, donc, dans ce nouvel article d’idées de lecture sur un thème de philosophie. Le thème de la liberté est aussi nécessaire à traité que difficile, parce qu’il est au cœur des plus gros contresens et conflits dans les débats politiques et sociaux actuels. Les plus érudits s’empressent d’embrouiller tout le monde en mélangeant les sens de liberté, et les plus honnêtes, perdus dans ce flou lexical, finissent invariablement par répondre « c’est ma liberté et ça dépend des gens » (comme les mauvais élèves…)

 

Voilà donc, en introduction, les trois sens de la liberté. Ces trois sens, qui sont trois « contextes » dans lequel on peut parler de liberté, sont, comme vous le verrez, extrêmement différents :

1 _ La liberté politique, que nous pouvons appeler indépendance. Est libre celui qui n’est pas contraint dans son action. Vous avez envie de porter un crop top au lycée et le règlement ne vous l’interdit pas, vous être libre. C’est cette définition de la liberté qui ouvre les débats sur « la liberté des uns commence où s’arrête celle des autres ». Réfléchir sur cette liberté se fait en philosophie bien sûr, et en politique.

2_ Le libre-arbitre, ou la capacité de choisir. Contrairement à la liberté politique qui est un fait, le libre-arbitre est une capacité que nous attribuons à l’être humain. Contrairement au chat qui, s’il a faim, ira manger ses croquettes, l’homme peut résister à sa faim et choisir de ne pas manger, pour protester par exemple. Quand un être humain choisit de faire quelque chose, il n’obéit pas forcément à la nécessité naturelle. Toute la question sera de savoir si cette capacité propre à l’être humain uniquement, au sein d’une nature entièrement déterminée, existe réellement ou est une illusion. Ce sens de liberté est interrogé en philosophie, en science (physique et biologie), en sociologie et dans le cadre de la justice (certaines maladies mentales peuvent annuler le libre-arbitre).

3_ La liberté intérieure, qu’on appelle autonomie. Libre sera celui qui est capable de résister à ses propres désirs, à ses besoins, à ses envies, pour se comporter moralement, selon le bien. Cette liberté s’oppose aux deux autres en tant qu’il n’est pas un fait, mais une conquête. Si le libre-arbitre existe, vous être libre d’office (au sens du libre-arbitre). Alors que la liberté au sens de l’autonomie se gagne à force d’efforts et de réflexion. Par exemple, imaginons que vous soyez enrôlé dans une secte : vous serez privé de votre liberté intérieure, n’étant plus capable de réfléchir par vous-même. Cela ne changera rien, d’une part, à vos libertés politiques, ni au libre-arbitre, que vous avez toujours en vous. C’est la volonté de contredire votre gourou qui vous manque. Ce sens de liberté est interrogé en philosophie, en psychologie et en sociologie.

 

Maintenant que les distinctions sont posées, passons à ce qui vous intéresse, la présentation des livres !

 


Je vais commencer par la série Divergente parce que… eh ben je ne l’ai jamais lue ! J’en parle quand même parce que j’ai vu le film (le premier seulement, et je n’aime pas du tout, donc je pense que je ne les lirai jamais) et que c’est une série très populaire. Que je n’aime pas n’est pas ce qui est important ici. La société de Divergente est une société où la liberté, entendue au sens de liberté intérieure, dérange : les citoyens, quand ils sont jeunes, doivent choisir une faction, un mode de vie, qui correspond à leurs capacités générales. Et une fois qu’ils y sont, ils doivent se comporter comme les autres membres de leur groupe durant le reste de leur vie. Par ailleurs, ils passent d’abord un test, leur indiquant quelle est la faction qui leur conviendrait le mieux. Il est même dit que, la plupart du temps, les enfants choisissent la faction dans laquelle ils ont été élevés. Une parfaite reproduction sociale, dans laquelle le pire danger, celui qui est chassé et anéanti, est l’existence de « divergents », des personnalités trop libres pour être enfermées dans une identité précise. Le contexte politique et social de cette dystopie est donc on ne peut plus intéressant. Si je n’ai pas aimé, c’est juste à cause du scénario qui s’ensuit…

 


Après avoir parlé de trilogie, reprenons un roman à la fois fantastique et « historique » (au sens où l’histoire a lieu au XIXème siècle, dans l’Angleterre de Dickens). Smoke, le titre du roman, fait référence à la fumée qui est créée par les êtres humains, et qui se manifeste chaque fois que l’un d’eux fait preuve d’immoralité. Il faut entendre l’immoralité ici en un sens très large : la colère, les mauvaises pensées, la sexualité, tout cela est inclus dans l’immoralité. Pour ne plus fumer, il faudrait être un saint : un pur esprit, animé uniquement par le Bien et l’altruisme, et c’est ce vain objectif que vont poursuivre certaines personnes de ce monde, quitte à mettre leur vie et leur santé mentale en danger. Le lien avec la liberté intérieur est assez évident : peut-on atteindre cette liberté intérieure parfaite ? Cependant, un aspect sociologique s’ajoute à ces réflexions : quand les élèves d’un prestigieux internat vont pour la première fois visiter Londres, une ville polluée de fumée tant le crime y est présent, ils sentent naître le désir de faire le mal. J’ai vraiment bien aimé ce roman, très complet, très riche, et l’aventure des deux héros est très sympa.

 


Faisons une petite digression vers un autre sens de liberté, qui est plus rare, mais toutefois assez présent dans des histoires du type voyage dans le temps. Il ne faut pas confondre destin et déterminisme ; le libre-arbitre s’oppose aux deux. Le libre-arbitre signifie que les actions que je fais sont choisies par ma conscience, et je suis l’unique cause de toutes mes actions. A cela deux idées s’oppose : le déterminisme, qui considère que mes actions s’inscrivent dans une suite causale, comme le reste de la nature ; ou le fatalisme, qui considère que « tout est écrit à l’avance » : mes actions ne sont donc que la conséquence d’une volonté divine, supérieure, qui a choisi pour moi ce qui allait m’arriver. Dans les livres traitant du voyage dans le temps, cette distinction est essentielle : soit le fait que j’arrive dans une époque où je n’existais pas va créer une nouvelle chaîne de causalité et changer le futur (modèle Retour vers le futur) ; soit, malgré tous mes efforts, je n’arriverai pas à changer le futur, parce que le destin va s’accomplir quoi qu’il arrive. Dans Comment tu m’as fait mourir ? de Gilles Abier, un lycéen imagine, dans un texte, des morts horribles pour chacun de ses harceleurs. Alors que la journée suivante commence exactement telle qu’il la décrite dans son histoire, il va bien sûr essayer de contrer le destin et sauver ses camarades.

 


Revenons à une saga à présent. Je n’ai lu pour l’instant que le premier tome, mais la question de la liberté y est déjà centrale. Je ferai sûrement un article complet quand j’aurai lu l’ensemble de la saga. Pour l’instant, parlons de ce qui nous intéresse, la façon dont le thème de la liberté est abordé dans Borderline de Zoë Hababou. Travis, le personnage principal, a eu une enfance difficile, et a nourri un rejet total de l’autorité et de la société. Une liberté-indépendance est recherchée en premier lieu. Ce sera le thème du premier livre, mais quelques passages laissent entendre qu’une liberté-autonomie (liberté intérieure) serait bien plus féconde dans une telle existence. Les deux notions de liberté sont donc déjà comparées, et je sais bien que ce sera l’objet des tomes suivants. Une série à suivre donc, si vous voulez réfléchir sur la meilleure façon de devenir libre.

 


Enfin, je vais à nouveau parler d’un de mes propres romans, parce qu’il a été écrit spécialement pour illustrer une thèse sartrienne sur la liberté. Sans m’étendre sur Sartre, je fais immédiatement le résumé du contexte de Masques. Dans cette société, c’est le libre-arbitre qui n’existe plus. Les êtres humains existent par groupes, et agissent, pensent et éprouvent selon le groupe auquel ils appartiennent. Dès lors, face à un individu, nous savons immédiatement comment il va réagir à telle ou telle situation : pas de surprise possible, puisqu’il n’y a pas de libre-arbitre. Les comportements humains sont aussi nécessaires que les comportements des animaux. Cette nécessité vient de quatre masques, déterminant entièrement les quatre groupes : mais le groupe des Hackers, qui sont tous les criminels, les menteurs, les brutes, va séparer ces masques pour essayer de briser le déterminisme dont ils sont victimes.

dimanche 13 décembre 2020

Mon classement des Pokémon légendaires

 

Bonjour à tous !

Fêtons ensemble la sortie de Philosophe, Pikachu ! mon dernier essai de pop-philosophie. Pour ceux qui ne connaissent pas le principe, il s’agit d’illustrer des thèses compliquées avec des exemples issus d’œuvres de la culture populaire. Très utile pour des élèves de Terminale qui auraient du mal à comprendre, ou même à mémoriser leur cours ! Mais aussi à tous les curieux qui s’intéressent à la philosophie mais ont trop peur de commencer par l’intégral de Kant (comme je vous comprends !) Ce sera donc une petite introduction pour vous donner envie d’aller voir par vous-mêmes.



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 Pour fêter cette sortie, je vais faire quelques articles pour parler de Pokémon, et un peu de moi. Je vous propose un premier classement de mes Pokémon légendaires préférés. Je commence par les légendaires, comme c’est de la mythologie Pokémon que je parle dans la première partie du livre. D’abord, voici la liste de tous les Pokémon légendaires :

 

Première Génération : Artikodin, Electhor, Sulfura, Mewtwo et Mew

Deuxième Génération : Raikou, Entei, Suicune, Lugia, Ho-oh et Célébi

Troisième Génération : Régirock, Régice, Régisteel, Latias, Latios, Kyogre, Groudon, Rayquaza, Jirachi et Deoxys

Quatrième Génération : Créhelf, Créfollet, Créfadet, Dialga, Palkia, Heatran, Regigigas, Giratina, Cresselia, Phione, Manaphy, Darkrai, Shaymin et Arceus

Cinquième Génération : Victini, Cobaltium, Terrakium, Viridium, Boréas, Fulguris, Reshiram, Zekrom, Démétéros, Kyurem, Keldeo, Meloetta et Genesect

Sixième Génération : Xerneas, Yveltal, Zygarde, Diancie, Hoopa et Volcanion

Septième Génération : Cosmog, Cosmovum, Solgaleo, Lunala, Tokorico, Tokopiyon, Tokopisco, Tokotoro

Huitième Génération : Ethernatos, Zacian, Zamazenta, Silveroy, Blizzeval, Spectreval, Zeraora, Zarude, Regidraco, Regieleki, Artikodin de Galar, Elector de Galar, Sulfura de Galar

 

Oui, ça en fait beaucoup ! Et je ne les connais pas tous, d’où ma première catégorie de classement qui serait « Ceux que je ne connais pas ». Parce que je ne les ai jamais rencontrés dans le jeu notamment ou, pour ceux de le dernière génération, je les ai vus très rapidement sans avoir vraiment eu le temps de les connaître.

 

Premier groupe : Ceux que je ne connais pas

Jirachi – Shaymin – Arceus – Phione – Manaphy- Meloetta – Genesect – Victini – Diancie - Hoopa – Volcanion – Blizzeval – Zeraora – Regidraco - Keldeo

 

Bon, ça fait une bonne liste, mais deux choses : certains sont des Pokémon qu’on ne peut obtenir que par évènement et que je n’ai jamais eus. D’autres sont des générations de jeu auxquelles je n’ai pas beaucoup joué (notamment la 4G, sortie au moment où je ne jouais plus du tout, non pas parce que je n’aimais plus, mais parce que mes parents avaient décidé que ce n’était plus de mon âge et ne voulaient pas me les acheter :’( ) Je n’ai donc pas de commentaire à faire sur cette première liste, alors passons à la suite. Dans la prochaine catégorie « Moche et inutile », n’oubliez pas que je n’énonce que mes goûts personnels, et si votre légendaire préféré se trouve dans la liste, je ne vous juge absolument pas, ce n’est qu’une question de goût !

 

Deuxième groupe : Moches et inutiles

Lugia - Régirock – Régice – Régisteel – Latias – Latios – Zacian – Zamazenta – Solgaleo – Heatran – Regigigas – Deoxys – Zygarde – Tokotoro

 

Les golem ne sont pas des canon de la mode, on va le reconnaître… et même s’ils sont assez originaux dans la mythologie (golems fabriqués par des humains et animés par Arceus pour les protéger), ce n’est pas non plus le point de la mythologie Pokémon que je préfère. Pareil pour Latias et Latios, je ne les trouve pas très beau, et leur rôle dans la mythologie, en plus de ne pas être très clair à partir des jeux seuls, et assez peu intéressant par rapport au reste de la génération. J’adore la 8G et Galar, grâce aux nombreuses références à la culture anglaise et bien sûr (pour ce qui me connaissent) au football, mais les légendaires sont bof (et je compatis avec Zacian qui doit garder une épée dans la bouche tout le temps).

 

Troisième groupe : J’aime bien le concept mais moins le Pokémon

Cosmovum – Groudon – Rayquaza – Créhelf – Créfollet – Créfadet – Dialga – Palkia – Zekrom – Kyurem - Cobaltium – Terrakium – Viridium

 

Cosmovum, qu’on voit très exactement deux minutes dans le jeu, représente l’univers entier, contenu dans une toute petite surface (l’univers avant le Big Bang) et j’aime beaucoup cette idée. C’est le plus lourd de tous les Pokémon tout en étant extrêmement petit, j’aime beaucoup la symbolique mais après, il ne sert à rien, et on le voit à peine. Si j’aime beaucoup le scénario de la 3G, avec un team Aqua ou Magma qui pour la seule fois de tous les jeux se rendent compte du terrible cataclysme qu’ils ont causé en réveillant Kyogre ou Groudon, je ne suis pas fan de Groudon en soi, ni de Rayquaza. Pour Rayquaza, j’aime quand même beaucoup cette idée de protecteur contre les menaces extra-terrestres. Créhelf, Créfollet et Créfadet, ou les trois lutins qui servent à rien, représentent les composantes de l’esprit : volonté, émotions, intellects, et je trouve ça très sympas, mais je n’arrive même pas à les distinguer, ce sont les trois mêmes. Dialga et Palkia sont le temps et l’espace et, comme les précédents, j’aime beaucoup le concept, comme j’aime beaucoup la mythologie générale présentée en 4G, mais je les trouve moches. En 5G même chose, même si c’est une mythologie régionale propre à Unys, j’aime beaucoup l’introduction de la politique dans les jeux : une politique parfaite d’abord soutenue par le dragon originelle, qui face aux conflits sur la meilleure façon de gouverner, va se séparer en Reshiram et Zekrom, réalité et idéal. Je n’aime pas trop Zekrom, ni Kyurem, qui est l’espèce de carcasse restante du dragon originel détruit. Quant au trio des mousquetaires Colbatium, Terrakium et Viridium, même si la référence aux trois mousquetaires est bienvenue, je ne les aime pas trop.

 

Quatrième groupe : J’aime bien

Electhor – Sulfura – Mewtwo – Raikou – Entei – Cresselia – Darkrai - Ho-oh – Célébi – Boréas -Fulguris – Démétéros – Reshiram – Xerneas – Tokopiyon – Silveroy – Ethernatos – Spectreval - Electhor de Galar - Sulfura de Galar – Regieleki – Kyogre - Cosmog

 

Bon, à partir de là, vous avez clairement la nostalgie qui parle. La toute première version à laquelle j’ai joué était Pokémon Or, et même si je ne saurais pas vraiment dire pourquoi j’aime bien Ho-oh, je n’ai pas eu le cœur à le mettre plus bas dans le classement. Idem pour Electhor et Sulfura (leurs formes de Galar sont aussi très jolies), Mewtwo bien sûr. Le trio des chiens légendaires (Raikou, Entei, Suicune) fait vraiment partie de mes duos/trios de légendaires préférés, sans doute par nostalgie. Je n’ai jamais croisé Célébi dans les jeux mais j’aime bien sa grosse tête d’oignon ; Cosmog aussi est trop mignon. J’ai beaucoup aimé le trio des génies (Boréas, Fulguris et Démétéros) même si je ne peux pas vraiment les distinguer parce qu’ils n’ont que leur couleur qui change. Mais j’aime beaucoup quand même l’introduction de génies, et ils sont plutôt sympas physiquement. Dans la 8G, je n’ai pas aimé les légendaires principaux, mais j’aime beaucoup Ethernatos (un espèce d’immense squelette de dinosaure), Silveroy et son destrier Spectreval. Regieleki est marrant, et pour finir avec Kyogre, peut-être que je l’apprécie justement parce qu’il m’effraient un peu (j’ai la phobie des baleines, oui, mais Kyogre c’est une orque !! Wailord c’est une baleine. Je hais Wailord)

 

Cinquième Groupe : Un de mes préférés

Artikodin – Mew – Giratina – Yveltal – Lunala – Tokopisco – Tokorico – Zarude – Artikodin de Galar

 

Il y a pas mal de spectre-ténèbres-psy dans ce groupe, mais c’est vrai que c’est un trio de type que j’adore dans le jeu. J’aime beaucoup la mythologie entre Yveltal et Xerneas (la mort et la vie) mais si je n’aime pas trop Xerneas, j’adore Yveltal. Je trouve Lunala extrêmement beau même s’il ne sert à rien, idem pour Artikodin et sa forme de Galar. Giratina est assez effrayant et représente le Mal, banni dans un autre monde. Parmi les Toko d’Alola, mes préférés sont Tokorico le guerrier et Tokopisco la sirène, mais j’aime bien le groupe entier. J’ai obtenu Zarude récemment et j’ai vraiment flashé sur ce méchant singe de type ténèbres. Et enfin Mew, qui est trop mignon (un chat rose quoi !)

 

Mon légendaire préféré : Suicune

 


Il doit y avoir un peu de nostalgie là-dedans puisque c’est un légendaire de la 2G, c’est clairement le légendaire de mon enfance, mais même si on oublie ça, je trouve Suicune tellement beau, aves ses longues pattes de chat, ses couleurs claires, tout ça tout ça. Je n’ai pas eu la moindre hésitation sur celui qui allait être mon préféré, de toute façon c’est toujours le premier qui me vient.

 

Voilà les amis, j’espère que ça vous aura plus, et on se retrouve plus tard pour un nouveau classement de Pokémon !

dimanche 6 décembre 2020

#Murder, entre rire et effroi

 

Extrêmement drôle et en même temps assez terrifiant sur ce que pourrait être la société, #Murder aura été sans aucun doute ma découverte de l’année (ça tombe bien, l’année est presque finie, il ne sera pas détrôné !)

 

Je ne pense pas que #Murder soit lui-même incroyablement exceptionnel et original. Au contraire, je pense que beaucoup y verront trop de thèmes vus et revus dans les dystopies jeunesse récente, et d’habitude je suis la première à me plaindre des thèmes ou scénarios vus et revus. Si j’ai adoré celle-là, c’est seulement grâce à un formidable hasard, qui a fait que tous mes intérêts, tous mes travaux d’études se retrouvent ici utilisés et détournés. Le cannibalisme dans un roman qui utilise aussi les princesses Disney… c’était inratable. Enfin, ça aurait pu l’être, mais ça ne l’est pas (raté).

 


#Murder est une dystopie, où la peine de mort (qui existe toujours aux Etats-Unis) ne se fait plus pas injection ou chaise électrique : la mort des criminels doit être un spectacle. Toujours plus innovant, plus cruel, plus spectaculaire : les condamnés sont envoyés sur l’île Alcathraz 2.0 où les attend un groupe d’une dizaine de bourreaux, ayant chacun sa spécialité. Ils ne savent pas combien de temps ils vont survivre (c’est le grand organisateur, le Postman, qui décide de quel bourreau doit tuer quel condamné et à quel moment), ni par qui ils vont se faire tuer. Et il y a du choix ! La cannibale qui fait bouillir ou dévore le condamné vivant, le faux producteur de films d’action qui va tuer véritablement l’acteur jouant la scène, Robin des bois et ses flèches… et, mon préféré même s’il n’apparaît pas longtemps, le prince Tranchant, qui s’occupe surtout des femmes, et les déguise en princesse Disney avant de les poursuivre dans un labyrinthe mortel. Toutes ces morts sont diffusées en direct sur internet et commentées par le public. La peine de mort est devenu un véritable buiseness : les bourreaux ont non seulement leur page sur les réseaux, mais leurs posters, leurs T-shirt, leurs goodies, leurs fans. Et il faut dire que, d’un point de vue social, ça fonctionne : le crime a incroyablement baissé depuis la création de l’application.

 

Mais voilà le problème : le crime a baissé, tellement baissé que pour pouvoir continuer à envoyer des condamnés sur Alcathraz 2.0 et ne pas perdre son commerce, le Postman va devoir inventer des criminels. Voilà comment Dee, une lycéenne, arrive sur l’île, après la mort de sa demi-sœur et un procès bidon qui l’a désignée coupable. Elle se réveille habillée d’une robe de Cendrillon, et sait tout de suite qu’elle sera une victime du prince Tranchant. Mais tout ne va pas se passer comme prévu et, de révélation en révélation, nous allons découvrir l’île, les tueurs et les condamnés, et qui découvrent tous un point commun : … Non je ne vais pas le dire ! En plus du récit de Dee, il y a aussi des passages où l’on peut lire les commentaires des spectateurs sur les réseaux, accompagnés de complotistes qui ne croient ni aux exécutions, ni au système.

 

Si vous aimez les dystopies, je vous propose donc celle-là. Si vous aimez bien les détournements de contes en horreur (comme dans Les contes interdits mais juste pour le concept, ce roman ne vise pas le gore au même niveau que la collection des contes interdits), ça vous plaira sûrement aussi. Et pour le mystère, le suspense, les traitres, les survivants… allez-y !

(Et que vois-je à l’instant ? Il y a un Tome 2 ! Ah làlà c’est la première fois de ma vie que je suis aussi heureuse de voir un Tome 2)

mardi 1 décembre 2020

Angel et Spike : l’action morale

 

Nous avons parlé des Tueuses (Buffy, Tueuse de vampires) ; nous avons parlé des méchants (Les méchants de Buffy (1) et Les méchants de Buffy (2)). Pour ce quatrième rendez-vous avec Buffy, nous allons continuer notre lancée sur l’analyse des personnages, et cette fois, nous allons nous intéresser aux amoureux de Buffy et plus précisément, à ses amoureux vampires.

 

Angel et Spike sont deux profils tout à fait différents et pourtant, à partir de la saison 4, ils vont avoir un immense point commun, point commun qu’ils sont les seuls vampires de toute l’histoire à partager : l’un comme l’autre est incapable d’attaquer les humains, et combattent les démons aux côtés de Buffy. Comme d’habitude, nous allons commencer par une description des personnages.

 


Angel s’appelait Liam quand il était humain, il vivait dans l’Irlande du XVIIIème siècle. Il mène une vie de débauche qui déplaît fortement à son père, qui le méprise ouvertement. Son existence change lorsqu’il rencontre Darla, la vampire qui l’engendre (engendrer, dans la série, signifie transformer en vampire). Il prend le nom d’Angélus, et Darla et lui deviennent de véritables terreurs dans le monde, des vampires puissants et sanguinaires, sans aucune pitié, qui torturent des enfants pour le plaisir, transforment la fille d’un chasseur de vampire pour l’obliger à la tuer, etc. Bref, on comprend mieux en quoi le retour d’Angélus, dans la saison 2 de Buffy contre les vampires, est si difficile à gérer. Au XIXème siècle, Angélus rencontre la voyante Drusilla, pour qui il développe une véritable obsession. Après de longs mois de harcèlement et de torture psychologique, il l’engendre. Celle-ci, à son tour, va engendrer un certain William, qui ne sera nul autre que Spike. Si vous avez bien suivi, vous avez donc compris qu’Angel est, en quelque sorte, le papi vampire de Spike. Mais revenons à Angélus : quelques années plus tard, alors que la famille que forment Darla, Angélus, Drusilla et Spike sème la terreur, Angélus fait l’erreur de s’en prendre à une bohémienne, et le peuple sorcier dont elle est issue décide de la venger. Loin de poursuivre Angélus pour lui infliger les mêmes tortures physiques, ils trouvent un moyen bien plus cruel : il lui rendent son âme humaine. Désormais doué d’une conscience morale, Angélus, qui devient Angel, découvre la culpabilité liée à tous ses meurtres passés. La torture que le peuple bohémien lui inflige, bien pire que la torture physique, est une torture psychologique : Angel est placé face aux horreurs qu’il a commises, et est condamné à une souffrance éternelle. Car, s’il venait un jour à connaître le bonheur, même un court instant, il perdrait de nouveau son âme (ce qui arrivera, donc, dans la saison 2…)

 

Passons à Spike. William, se son vrai nom, vit à Londres, au XIXème siècle. C’est ce qu’on appelle un poète raté. Il est régulièrement humilié dans les salons mondains, rejeté par la femme dont il est amoureux, et la seule personne à le soutenir est sa mère, atteinte de tuberculose. Il est repéré par Drusilla, qui face au couple que forme Angélus et Darla, décide d’en faire un vampire pour l’accompagner. Malgré la perte de son âme, la première pensée de William une fois vampire est d’engendrer sa propre mère, pour qu’elle ne meure pas de la tuberculose. Grave erreur, car sa mère, une fois vampire, ne garde pas la même compassion : elle l’humilie, lui répète tout ce qu’il a déjà entendu dans les salons mondains, se réjouit de pouvoir se débarrasser de lui après des années à en dépendre à cause de sa maladie, et finalement il préfère la tuer et rejoindre sa nouvelle famille de vampires. Très excité par le danger, il met souvent le groupe en danger et ses relations avec Angélus sont tendues dès le début. Dès qu’il apprend l’existence de la Tueuse de vampire, il se met en tête de l’éliminer. Durant sa vie, il tuera deux Tueuses, faisant de lui une véritable menace pour ces dernières. Sa réputation est définitivement assise. Lorsque Angélus perd son âme et quitte le groupe, Darla s’éloigne et il se retrouve seul avec Drusilla. C’est donc en couple avec elle qu’il fait sa première apparition dans la saison 2 de Buffy contre les vampires. Contrairement à Angel, Spike arrive à Sunnydale sans âme et comme ennemi : en effet, il espère bien ajouter une troisième Tueuse à son tableau de chasse (au sens propre, puisqu’il s’agit de la tuer !) Bien sûr, il n’arrive pas à la tuer, sinon la saison 2 serait déjà la dernière de la série. Mais la condition de Spike va à son tour changer radicalement dans la saison 4, alors qu’il est capturé par un groupe de scientifiques (dont on reparlera…) qui lui implantent une puce l’empêchant d’attaquer les humains. A partir de ce moment, Spike, tout comme Angel bien que pour des raisons totalement différentes, devient inoffensif. Son envie de danger et de bagarre sont telles que quand il découvre que la puce ne l’empêche pas de s’en prendre aux démons, il préfèrent combattre le mal avec Buffy et ses amis plutôt que de rester inactif.

 

Voilà les histoires d’Angel et de Spike, et la façon dont ils en sont arrivés à se détourner des humains pour combattre les monstres. Si Angel est immédiatement accepté dans le groupe, il n’en va pas de même pour Spike. L’un et l’autre font pourtant le bien, en débarrassant le monde des forces du mal. Et pourtant, quand Spike se plaint de continuer à être traité comme un dangereux vampire alors qu’Angel avait été accepté même après être provisoirement redevenu Angélus, Buffy lui répond qu’il n’a pas d’âme, alors qu’Angel en avait une. A ce moment, Spike répond ce qui va nous intéresser dans cet article : « Moi, j’ai une puce, c’est la même chose. » Mais une âme et une puce, est-ce vraiment la même chose ?

 

Nos deux personnages posent un problème longuement interrogé par la philosophie morale : à quel condition peut-on dire qu’une personne agit moralement ? Angel et Spike font sans aucune doute quelque chose de bien : ils luttent contre les forces du mal, sauvent des individus, et n’attaquent pas les humains innocents. La valeur morale de ces actions ne sera, je pense, contestée par personne. Faut-il en conclure qu’ils agissent aussi moralement l’un que l’autre ? Spontanément, vous pouvez avoir l’intuition qu’Angel serait plus moral que Spike. En effet, s’il n’attaque pas les humains, c’est parce qu’il ne veut pas le faire. Si Spike ne le fait pas, c’est parce qu’il ne le peut pas : cela laisse entendre (à raison !) que s’il le pouvait, il le ferait. Mais, de fait, il ne le fait pas. Faut-il lui retirer alors toute la moralité de son action ?

 

Deux courants de pensée s’opposent en philosophie morale (en réalité, il y en a trois, mais seulement deux nous intéressent ici) : la morale déontologique et la morale utilitariste. Vous devriez vite comprendre à quel personnage chacun d’eux se rattache. Rappelons quels sont les avis qui divergent : Buffy pense qu’il y a une différence entre les actions d’Angel et celles de Spike, parce que l’un agit grâce à son âme, l’autre à cause de sa puce. Spike pense qu’il n’y a aucune différence, puisque quelle que soit la raison pour laquelle ils agissent, les actions concrètes sont exactement les mêmes. Nous allons parler de deux philosophes : Kant (pour la déontologie) et Mill (pour l’utilitarisme). Pour Kant, une action est moralement bonne si elle est issue d’une bonne volonté. Pour Mill, une action est morale si elle tend à augmenter la somme globale de bonheur dans l’univers, ou si elle tend à diminuer la somme globale de souffrance dans l’univers : en un mot, mon action est morale si ses conséquences sont bonnes. Prenons un exemple simple : aider un SDF à trouver un logement. Selon Kant, cette action est morale parce que « aider les autres », en général, est une action bonne en elle-même. Selon Mill, cette action est bonne parce que, grâce à celle-ci, le SDF sera plus heureux ; on peut même ajouter que les passants agacés ou gênés de voir un SDF faire la manche seront également libérés d’une source de malheur : j’aurais donc à la fois augmenté la somme globale de bonheur dans l’univers, et diminué la somme globale de malheur.

 

Si la théorie de Mill peut sembler plus compliquée à comprendre, elle est pourtant largement partagée : plus je fais une chose qui augmente le bonheur des gens qui m’entourent, plus j’agis bien. Cependant, cela signifie que, pour Mill, seules les conséquences sont à prendre en compte : peu importe si j’agis dans mon propre intérêt, ce que je fais n’en est pas moins moralement bon. Si, par exemple, j’ai aidé le SDF à trouver un logement pour me faire bien voir de mes proches, ou de mes connaissances professionnelles, peu importe : j’ai bien agi malgré tout. Après tout, j’aurais très bien pu essayer de gagner leur admiration en me faisant passer pour quelqu’un d’altruiste, sans jamais agir concrètement, alors pourquoi retirer le mérite de ce que je fais ? Certes, Spike combat les démons uniquement parce qu’il ne peut toucher aux humains, et parce que cela lui apporte du plaisir. Mais il aurait très bien pu, ne rien faire, et chercher son plaisir ailleurs. Faut-il nier son implication auprès de Buffy et de son équipe ?

 

Pourtant, au fond de vous, vous avez peut-être du mal à penser qu’une action moralement bonne faite uniquement dans notre intérêt n’est pas pleinement morale. Offrir un logement à un SDF juste pour gagner en prestige social, et servir sa propre carrière, cela peut vous sembler trop égoïste, trop hypocrite peut-être, pour être véritablement moral. Quand on dit que quelqu’un est une bonne personne, nous excluons en général ceux qui affichent ouvertement leurs bonnes actions dans le but d’être admiré. Imaginons un candidat à un poste important qui se mettrait à faire des dons à de nombreuses associations, juste pour être bien vu et récupérer des voix : nous aurons tôt fait de penser qu’il se moque totalement du sort de ces associations, et qu’on ne peut pas dire qu’il est une bonne personne. C’est pourquoi, chez Kant, l’action faite par intérêt ou par inclination est conforme au devoir, mais tant que l’action n’est pas faite par devoir, c’est-à-dire par la seule volonté de faire le bien, n’est pas une action morale.

 

Dès lors, Kant sera d’accord avec Buffy dans sa distinction entre Angel et Spike. Angel veut faire le bien, et sa bonne volonté et le seul critère de la moralité d’une action. Il ne le fait pas parce que cela sert ses intérêts : ce n’est pas pour se faire bien voir de Buffy qu’il l’aide, puisqu’il avait déjà cette attitude avant de la connaître. Ce n’est pas non plus parce que cela lui apporte du plaisir ou du bonheur : n’oublions pas que, si Angel éprouvait du bonheur, il perdrait de nouveau son âme. Il agit ainsi uniquement parce que c’est ce qu’il faut faire, au sens moral du terme. Mill, en revanche, reconnaîtrait que Spike n’est pas moralement différent : qu’importent les raisons qui lui font faire le bien, puisque, de fait, il fait le bien ? Mill est conscient qu’une bonne intention peut conduire à des conséquences plus mauvaises que si nous n’avions rien fait, ou si nous avions fait une action qui, en apparence, semble immorale. Prenons un exemple très parlant : faut-il dire à mémé Marcelle, pleine de joie de se penser en forme et bientôt guérie, qu’elle a un cancer incurable et est à deux mois de la mort ? Pour Kant, assurément, il faut le faire : dire la vérité est une bonne chose en elle-même. Certes, je risque de faire du mal à mémé Marcelle, dont toute la joie retombera. Mais dire la vérité est un devoir moral. Pour Mill, en revanche, quelle que soit la noblesse de la vérité, dire la vérité dans ces circonstances auraient de mauvaise conséquence : mémé Marcelle est heureuse (bien que ce bonheur soit fondé sur une illusion) et dire la vérité la rendrait malheureuse. Faut-il vraiment rendre malheureux quelqu’un qui n’a que deux mois à vivre ? Evidemment, pour Kant, si vous lui dites la vérité dans le but  de la faire souffrir, parce que mémé Marcelle a toujours été odieuse avec vous et que sa souffrance vous ferait plaisir, vous n’agissez pas non plus moralement. Certes, le devoir moral doit toujours être respecté, mais pour de bonnes raisons. N’oublions pas que l’intention est primordiale dans le système de Kant.

 

Alors, selon vous, qui d’Angel ou de Spike dirait à mémé Marcelle qu’elle va mourir ?

 

Je vous laisse sur cette question. Si vous souhaitez découvrir d’autres dilemmes moraux, d’autres conflits entre déontologisme et utilitarisme, je vous conseille l’excellent et très accessible L’influence de l’odeur des croissants chauds sur la bonté humaine de Ruwen Ogien.

Pour ceux qui n’ont pas peur de se plonger dans un vrai livre de philosophie, L’utilitarisme de Mill est assez lisible. Et pour les plus courageux, le système de Kant est entièrement et précisément exposé dans Les fondements de la métaphysique des mœurs (oui, même le titre fait peur !)

 

Nous en avons fini avec l’analyse des principaux personnages. A partir du mois prochain, nous nous intéresserons à l’analyse de certaines saisons dans leur globalité, et je n’en dis pas plus !