Entre écriture
et obligations de fin d’année, je n’ai pas pu faire d’article avant les
vacances, et ensuite je me suis dit que ce serait aussi bien de faire un long
article avec toutes mes lectures. Ils sont toujours dans l’ordre de mes
préférences, alors pour connaître mes goûts, allez plutôt vers la fin ;-)
L’art d’avoir
toujours raison,
Schopenhauer
Petit livre de
vingt pages très amusant, mais prenez garde, ces vingt pages sont quand même
plutôt difficiles. Il y a notamment un certain nombre de références à un livre
d’Aristote que je n’avais pas lu, ce qui m’a empêché de tout comprendre. Il
n’empêche qu’à peine la lecture terminée, on éprouve l’envie de tester
quelques-uns de ces stratagèmes. Je pense toutefois qu’au lieu de nous montrer
comment persuader, ce livre nous permet surtout de repérer chez les autres les
stratégies rhétoriques qui visent à donner l’apparence du vrai alors que le
discours n’a aucune cohérence ni aucun vérité.
Les mangeurs
d’autres,
Georges Guille-Escuret
Un livre
sociologique qui étudie le cannibalisme, aussi passionnant que difficile à
lire. Il est très long, très précis, et vraiment compliqué sur certains
passages, plus à cause de la façon d’écrire de l’auteur que pour le contenu
même. Un style très universitaire et qui, je l’avoue, m’agace un peu, parce que
ça aurait pu être très accessible si l’auteur n’avait pas volontairement fermé
son livre au grand public. Je ne regrette pas cette lecture pour autant, je
regrette simplement de ne pas pouvoir la recommander.
Numéro quatre, Pittacus Lore
Comme je me suis
récemment replongée dans les lectures pour adolescents, pour voir ce qui se
lisait en ce moment (même si celui-ci commence à dater), j’ai donc tenté numéro
quatre, une histoire entre la Science-Fiction et le fantastique, que j’ai bien
aimé. La structure de récit initiatique classique pour ado est suivie, alors
l’ensemble est assez prévisible dès qu’on s’y connaît un peu en littérature,
mais ça ne change rien au plaisir. Au contraire, c’est même beau de retrouver
dans un roman de jeunesse les fondements de la grande littérature.
Médée, Jean Anouilh
Il est tombé
entre mes mains, et je ne l’avais jamais lu. Au passage, je me suis aperçue que
je n’avais rien lu d’Anouilh à part Antigone.
Or, Médée fait partie de mes mythes préférés et la version d’Euripide du mythe
est une de mes pièces préférées. La version d’Anouilh reflète bien le style et
les habitudes de l’auteur : moins tragique (au sens littéraire et antique
du terme), elle s’inscrit dans une ambiance plus contemporaine, et centre les
dialogues non plus sur la folie et le destin, mais sur la haine du bonheur
d’autrui et l’emprisonnement dans une certaine identité qui rend tout
changement impossible. Mais le but ici n’est pas de faire une analyse. Sans
jamais avoir été une fervente admiratrice de l’écriture d’Anouilh, de long
passage sur le bonheur et la haine qu’il inspire à Médée valent le détour.
Professeur de
philosophie. Entrer dans le métier (collectif)
Oui. Ça
n’intéresse personne à part moi. Mais j’ai dit que je mettais là tout ce que je
lisais. Et je l’ai lu. Et c’est bien. Et si certains veulent faire prof de
philo, demandez-le moi.
Les coloriés, Alexandre Jardin
Trouvé dans une
boite à lire (encore !), ce fut une belle surprise. Les coloriés sont une
culture qui a renoncé à toute culture « adulte » : tout leur
système repose sur le jeu, la simulation, ils refusent de prendre quoi que ce
soit au sérieux et pourtant se sentent bien plus proches de la vérité que ne
peuvent l’être les adultes, toujours en train de mentir ou de faire des fausses
promesses. L’histoire est en deux temps, d’abord une coloriée se retrouve en
France, puis un adulte rejoint l’Enfance, le pays des coloriés, et donne
beaucoup de pistes intéressantes pour une réflexion sur la culture.
Rain, Au cœur de
l’orage,
L’œil du cyclone, Au-delà de
l’arc-en-ciel, Virginia Andrews
Je me suis
replongée en enfance (enfin… en adolescence) en lisant une nouvelle série de
Virginia Andrews, un auteur que j’adorais à l’époque et dont j’avais déjà
presque lu tous les livres. Je n’ai pas été déçue, loin de là, j’aime ses
drames familiaux et la manière de les raconter. Je dois quand même admettre que
c’est vraiment toujours la même chose et que j’avais deviné globalement le
déroulement des 4 tomes après 10 pages. Mais si vous n’avez encore jamais lu
cet auteur, il faut le faire, car vous aurez probablement de belles surprises. J’ai
moi-même eu deux ou trois surprises sur l’ensemble des quatre tomes, mais j’ai
été déçue par le dernier, qui a semblé d’abord prendre une tournure
inhabituelle avant de retomber sur le bien-connu.
Janet, Crystal,
Brenda, Rebecca, En fuite,
Virginia Andrews
Malgré ce que je
viens de dire précédemment sur l’auteur, j’ai tout de même lu une deuxième saga
cet été. La structure variant complètement par rapport aux autres sagas, j’ai
tout de même été surprise et j’ai bien plus appréciée celle-ci, qui m’a semblée
plus originale (même si ce ne doit être qu’un effet dû au trop grand nombre de
lectures des autres sagas de l’auteur…) Au lieu d’avoir une saga familiale,
l’histoire d’un personnage central développé sur quatre tomes, la saga Les orphelines développe les histoire de
quatre orphelines qui vont vivre de façon totalement différente le fait de ne
pas avoir de famille et de se retrouver chez des parents adoptifs. J’ai eu un
peu peur en lisant les trois premier du schéma extrêmement répétitif
« gentil-papa-content-d ’avoir-une-fille » /
« méchante-belle-mère-jalouse-de-sa-belle-fille », même si cette
structure ne peut que rappeler les contes que nous connaissons bien. Toutefois,
Rebecca fait exception à la règle. Janet et Brenda se ressemblent sur le fond,
mais la façon d’aborder le problème est malgré tout très différentes et rend
les deux lectures intéressantes.
Hate List, Jennifer Brown
Enfin une
histoire horrible et traumatisante… mais en même temps tellement importante à
raconter. Un lycéen, Nick, a ouvert le feu en plein déjeuner et tué un certain
nombre de ses camarades, ainsi qu’un professeur, avant de se suicider. C’est le
seul coupable, mais comme il est mort, on ne peut plus haïr personne... Alors
c’est Valérie, sa petite amie, qui n’avait rien vu venir et sera pourtant tenue
responsable de tout et détestée à sa place. Je me suis peut-être reconnue dans
certains passages, sans pouvoir être plus précise, mais ce doit être ce qui m’a
touché à ce point dans cette histoire. Valérie n’a jamais voulu tuer personne
et n’a jamais eu de pensée suicidaire, elle n’a jamais vu les signes qui
annonçait pourtant bien le massacre (pas plus que n’importe quel autre d’ailleurs !)
mais elle se retrouvera quand même en psychiatrie à prétendre des troubles
qu’elle n’a pas pour prouver sa volonté de guérir. Plus que le drame autour de
la fusillade dans un lycée, qui peut bien sûr en intéresser plus d’un, je pense
que la lecture peut surtout montrer à quel point les jugements que l’on porte
sur les autres peuvent avoir des conséquences. Double jugement dans ce
cas : en amont, le harcèlement de Valérie et de Nick qui ont conduit à la
tragédie ; en aval, les jugements sur Valérie qui rende atroce sa
réinsertion, alors qu’elle est autant victime que les autres, et souffre d’une
double-peine.
L’échange, Alan Brennert
Une magnifique
histoire de deux hommes qui en réalité n’en sont qu’un. Rick et Richard sont
deux versions d’une même personne, dans deux mondes parallèles, qui se sont
construit autour d’un choix crucial qu’a fait Richard Conchrane à un moment de
sa vie : renoncer à l’enfant que portait sa petite amie pour devenir une
star de Broadway, ou se marier avec elle et élever l’enfant dans sa petite
ville. Rick et Richard, chacun empli des regrets de la vie qu’il n’a pas vécue,
échangent leur place et ont enfin une chance de connaître ce qu’ils ont raté.
Je crois bien que les dernières pages m’ont fait verser une larme. En tout cas,
c’est une belle histoire, et une belle réflexion sur la liberté, l’importance
des choix et le bonheur.
Effacée,
Fracturée, Brisée,
Teri Terry
J’en viens enfin
à ce qui a été ma grande révélation de ma fin d’année scolaire (lue début juin).
Il s’agit en fait d’une série de trois livres, et non d’un seul titre. Un roman
jeunes adultes dystopique qui propose une nouvelle façon de régler le problème
de la délinquance juvénile : tous les mineurs de seize ans ayant commis un
crime sont effacés, c’est-à-dire que
leur mémoire est supprimée et ils sont envoyés en famille d’accueil afin de
commencer une nouvelle vie. Ils sont sous un appareil chargé d’indiqué leur
niveau de bonheur : si trop d’émotions négatives les submergent, ils
risquent la mort, et tout cela pour qu’ils ne puissent plus commettre le
moindre mal. Chaque tome de la série apporte une grosse révélation qui va
complètement bouleversé l’idée que l’on se faisait de ce monde, des groupes qui
s’affrontent et du personnage principal dont la quête d’identité est
primordiale. Moi qui suis plus que difficile en dystopie, et ai tendance à
souffrir de celles qui sont le plus à la mode, je n’ai qu’une envie :
mettre cette série-là en avant, parce qu’elle se distingue des autres. Je n’ai
qu’un seul énorme regret, la toute fin qui fait appel à un Deus ex machina que je n’ai pas su justifier. Peut-être qu’une
interprétation intelligente de ce dénouement m’aiderait d’ailleurs à y voir
plus clair… si certains sont intéressés.