Le sens de vérité m’a toujours
semblé assez clair. Une proposition vraie est une proposition conforme au réel.
Il n’y a donc pas de sens à dire « c’est ma vérité, c’est pas la même
que la tienne ». Pourtant, je vois cette phrase non seulement dans des
copies, mais aussi séries, films, livres et débats politiques à la télévision.
Alors faites-moi plaisir, après cet article : n’utilisez plus le mot
« vérité » pour dire n’importe quoi. Si vous n’avez pas le même avis
qu’autrui… ben vous n’avez pas le même avis, la même opinion, ou, si vous êtes
un scientifique, la même thèse ou théorie. Mais la vérité est unique, et ce
n’est pas parce que vous ne la connaissez pas qu’il n’y en a pas.
Une fois ces contresens
écartés, en philosophie, nous nous intéressons entre autre à la question de la
recherche de la vérité. Quelle méthode faut-il avoir ? Cette question fut
dans les toutes premières de la réflexion philosophique, et certaines réflexion
ont permis la création des sciences (physique, biologie, mais aussi
psychologie, sociologie, etc.) Quels critères permettent de s’assurer qu’on a
bien atteint la vérité ? Et comment se rendre compte qu’on est dans
l’erreur ou dans l’illusion ? Il y a bien des événements ou des certitudes
qui nous paraissent vraies, et ne le sont pas toujours. Distinguer ce qui est
vrai de ce qui est vraisemblable est une première étape, et elle est loin
d’être facile.
La plupart des livres que je
vais présenter ici interrogent justement le problème de l’illusion :
comment peut-on se rendre compte que ce qu’on croyait être vrai ne l’est pas
toujours ? Il y aura une exception à ce thème, par laquelle je vais
commencer.
Vous connaissez peut-être Le
Cercle de Dave Eggers, adapté au cinéma avec Tom Hanks et Emma Watson. J’ai
déjà parlé de l’un et de l’autre dans un même article dont je mets le lien à la
fin. Le film a totalement occulté la réflexion sur la vérité, qui est centrale
dans le livre. Le Cercle est une société qui veut rassembler toutes les
informations sur la population, tout filmer, jusqu’aux moments les plus
intimes, pour que plus rien ne puisse être secret ou inconnu. Plus de mensonge,
plus de choses cachées, que la vérité, facilement accessible pour tous, et sur
tous les sujets. Un projet qui va vite montrer ses failles : veut-on
vraiment qu’autrui sache tout sur nous-mêmes ? Veut-on vraiment tout
savoir sur notre passé, se rappeler tous les souvenirs même les plus mauvais,
supprimer tout mystère ? Tout le livre tourne autour de cette réflexion.
Pas le film. Donc si le sujet vous intéresse, c’est le livre qu’il faut
lire !
Passons maintenant au thème le
plus fréquent : la question de l’identification de la vérité. Plus
fréquent, parce que des personnages qui errent dans les illusions sont bien
plus faciles à mettre en scène que la recherche du savoir absolu. Commençons
par Benzos de Noël Boudou. Le personnage principal de ce roman est
addict aux somnifères. Mais bientôt, la frontière entre la veille et le sommeil
ne sera plus aussi claire qu’elle l’est dans la vie quotidienne. Une belle mise
en scène de ce passage bine connu des Méditations Métaphysiques de
Descartes, où il reconnaît que l’existence des rêves, parfois très réalistes, met
en crise la certitude absolue de l’existence du monde extérieur.
Dans le même thème que Benzos,
plusieurs nouvelles de ce recueil de Julianna Lyn, Blessés. Ce n’est pas
le thème général du recueil, qui présente plutôt des souffrances individuelles,
mais certaines souffrances sont justement dues à une interprétation faussée de
la réalité. Nous voyons le monde extérieur avec nos propres yeux et nous
l’interprétons avec notre propre esprit. Seuls, isolés, absolument rien ne peut
nous garantir que ce que nous croyons vrai l’est effectivement. Je retiens
notamment « Dans les yeux du juge » et « La Disparition »
qui sont sur le thème.
Pour finir, un roman
directement en lien avec la philosophie, Aristote détective de Margaret
Doody. Aristote est connu pour sa méthode très rigoureuse de réflexion et
d’observation (et si vous avez vu une vidéo humoristique descendant Aristote en
montrant toutes les erreurs scientifiques qu’il a pu faire, prenez-la avec du
recul… Aristote a écrit des centaines de traités pour étudier la nature alors
oui, sur des milliers de pages, on peut bien trouver 10 erreurs…). Dans ce
roman policier, un jeune homme chargé de défendre son cousin accuser de meurtre
va se tourner vers Aristote pour savoir quelle méthode il faut suivre afin de
trouver la vérité sur ce qui s’est passé et révéler le véritable meurtrier.
Contrairement aux livres sur
la liberté et le bonheur qui abondent, ceux sur la vérité sont plus rares et
souvent bien plus intéressants. Commencez donc par cette liste, et si vous avez
d’autres suggestion de lecture, ça m’intéresse évidemment !
Le lien vers les livres déjà chroniqués : Le cercle
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