Nous voilà en
place pour ce Jeudi spécial autoédition, comme tout les jeudi d’ailleurs, et
c’est le moment de vous parler d’un livre autoédité dont il faut absolument
parler ! Comme vous le savez, je ne chronique pas tout ce que je lis, loin
de là, je me contente de parler de ceux qui doivent vraiment et absolument être
découverts. Et aujourd’hui, je vais vous parler… ou plutôt vous reparler d’un
auteur dont vous avez déjà entendu parler ici : L'Indé Panda

En général, je
n’aime pas parler d’« amélioration », parce qu’un roman n’est pas une
copie de philo et un auteur n’est pas un élève, il fait des choix qui lui sont
propres et que je n’ai pas à critiquer. Je me permets de le faire
exceptionnellement parce que j’ai discuté avec l’auteur avant, et qu’elle a
bien reconnu les défauts de ce texte comme, justement, des
« défauts » qu’il faut corriger, et qu’elle a visiblement corrigés
dans ses écrits suivants. C’est pourquoi je me suis empressée d’acheter le
deuxième tome pour le lire !
Quels sont donc
ces éléments négatifs qui m’ont poussée à ne pas adorer ? Ce premier point
est vraiment très personnel, et je pense qu’il n’a dérangé personne d’autre que
moi à la lecture. En effet, le premier reproche que je peux faire, et qui m’est
venu à peine au bout d’une dizaine de pages de lecture, c’est que c’est
beaucoup trop commercial à mon goût. Ce qui n’est pas un défaut pour la
notoriété de l’auteur, puisqu’il y a une espèce de condensé en un seul livre de
tout ce qui plait dans les autres livres. Mais c’est bien ça le problème :
les autres livres. On voit très
clairement apparaitre les influences de l’auteur, qui a l’air de copier les
livres qu’elle aime. Mais pas de panique ! Après tout, il faut bien
commencer par imiter les « grands » avant de pouvoir s’en détacher,
et ce n’est absolument pas un défaut, en tout cas pas pour un écrit qui a
plusieurs années. Je peux d’ailleurs vous assurer que Solenne s’est bien
détachée de ses modèles, si j’en crois ses derniers écrits, qui sont, cette
fois, pleinement originaux, au sens où j’entends l’originalité.
Et donc,
qu’est-ce que je trouve trop commercial, trop connu, trop attendu ?
Commençons par cette liste hallucinante de mots qui prennent une
majuscule : les Silhouettes, les Captifs, les Fuyards, les Chasseurs, les
Errants, la Bouche…. J’en oublie ? Peut-être. Bon, ça m’énerve, mais c’est
sans doute un problème psychologique qui m’est propre. Le seul que je trouve
pertinent, parce qu’il est justifié dans le roman, c’est le mot de
« Silhouette » : parce qu’on oublie que les Silhouettes sont des
êtres humains à part entière, qu’ils ont une conscience, une âme, une faculté
de choisir, et qu’elles sont réduites par ceux qui les appelle ainsi à de
simple formes extérieurs, vides de toute individualité. Et c’est là une belle
façon d’aborder la dictature : on ne voit plus d’individualité dans une
troupe qui marche droit, tous au même rythme. Il n’y a plus Jean, Jacques,
Paul, Pierre, Charles… il y a « les militaires » - ou, pour remettre
en contexte, les « Silhouettes ». Cela étant, il n’y avait pas besoin
de majuscule. Je trouve même que la majuscule donne du prestige, une
personnalité là où, justement, il n’y a rien : que des formes. Même chose
pour les autres termes, certains me semblent même en trop : je ne suis pas
sûre que la dénomination de Fuyards et Captifs apporte vraiment quelque chose.
Concernant
l’intrigue, elle aussi reflète le schéma ultra-classique de la dystopie
actuelle. En gros, une dictature qui marche bien, puis quelques-uns qui se
rebellent, puis tout le monde s’évade et se rebelle. L’ensemble est quand même
très attendu et manque fortement de personnalité à mon sens. Certes, le fond
est original ; mais c’est facile de trouver une histoire originale :
ce qui est dur, c’est de faire quelque chose d’original à partir d’un fond très
connu. Comme en peinture, il n’est pas difficile de peindre un paysage
fantastique peuplé de créatures imaginaires : mais comme le disait
Matisse, « je pense que rien n’est
plus difficile à un vrai peintre que de peindre une rose parce que, pour le
faire, il faut oublier toutes les roses peintes. » Le véritable
artiste n’est pas celui qui a le plus d’imagination, mais celui qui sublime un
objet bien connu. Le thème du rêve reste quand même un beau thème, qu’il aurait
été intéressant d’exploiter, très intéressant même, et c’est bien pour ça que
je fais une chronique : voilà une histoire qui aurait pu devenir une œuvre
magnifique, mais qui me semble un peu trop recouvrir le schéma dystopique, sans
oser s’en libérer.
En bref, si vous
voulez vraiment savoir l’impression que me font ces points négatifs… ils me
rappellent mes romans du lycée. Mais ce n’est pas un mauvais signe, loin de
là ! Ils me rappellent mes romans du lycée, où j’écrivais le genre de
livre que je lisais. Et maintenant, à l’inverse, je lis le genre de livres que
j’écris. Et je vais dire quelque chose de complètement inutile : j’aime
bien le genre de livres que j’écris. Il y a donc toutes les chances pour que
j’aime les livres de Solenne. D’ailleurs, la déception que j’ai eue face au
roman n’est pas si négative puisqu’il a été écrit avant la nouvelle que j’ai
adorée. Il y a donc une belle progression, mais j’ai surtout vu des signes
avant-coureurs dans La Rumeur, qui
laissait présager de grands textes par la suite.
Voici donc ce
que j’ai aimé dans la Rumeur et qui a
eu l’effet de me faire acheter immédiatement le deuxième tome. Je me souviens
tout d’abord de belles métaphores : il y a une belle écriture, qui
apparaît de temps en temps, et qui sera déployée à son paroxysme dans « Je
m’appelle Marion » (même si je suis sûre qu’il est possible de faire
encore mieux !) Par ailleurs, l’énorme point fort de ce roman est sa
structure. Je ne parle pas de la structure de l’intrigue évidemment, mais de la
structure du texte : en réalité, il y a très peu d’avancement dans
l’histoire, car le livre est essentiellement constitué de flash-back.
L’intrigue n’avance pas : l’histoire est en fait une accumulation
d’histoires de différents personnages, et là est la véritable originalité. Les
personnages sont présentés les uns après les autres – ce qui permet, en plus,
de ne pas se perdre, car à la fin il y a vraiment beaucoup de personnages – et
un chapitre flash-back raconte ce qui leur est arrivé jusqu’à ce point, ce qui
permet aussi de faire le lien : le livre n’est pas juste une liste d’histoires
sans rapport entre elles, on reconnait dans chaque récit quelque chose qui
appartenait à l’histoire d’un autre.
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